jeudi 14 mars 2013

✑ Dolphy Nakwafob ✑


Au Pere

          Dolphy, au teint rose comme les cuisses de ma voisine Mado la Normande (aussi joviale que joufflue, faisant plus envie que pitié, dont la circonférence ferait palir un tailleur grande taille), était la joie de vivre. Il avait les yeux dun vert limpide et sain comme une infusion dherbe et les cheveux doux et blonds comme le duvet dun poussin. Son maintien était celui dun danseur, sa silhouette souple et musclée. Sa démarche féline navait dégal que sa vive intelligence.Les femmes en étaient folles, les hommes ladmiraient.

          Au travail, il était encore invariablement sagement assis devant son écran, le dos bien droit sur son fauteuil à roulettes mais au fil des mois, sa physionomie avait changé. Il avait une tete dont le front extremement bombé lui donnait un air de dauphin.Ressemblance encore accentuée par ses sourcils totalement absents, ses minuscules yeux devenus noirs et espacés au point de donner limpression dun vide au milieu de son visage. Leffet était renforcé par un nez tout fin et très allongé surmontant quasi sans interstice une bouche dont on aurait plutot dit une large fente presque exempt de lèvres, si tenues et claires quelles se confondaient avec le reste de sa peau.

          Lors des sorties estivales proposées par le comité dentreprise, il était celui qui nageait le plus loin, au delà des balises et avec aisance, revenant plus dune heure apres que ses collègues aient rejoint leurs serviettes de plage et sallongeant haletants et fourbus sur le sable, heureux de ce bain de jouvance et sans laisser paraitre aucune espece de fatigue. Sa peau avait au fil du temps fini par prendre une teinte grisatre que la médecine du travail avait attribué à un problème delimination de toxines mais lopinion de son entourage à son propos navait en rien évolué: tous saccordaient toujours à le trouver parfait en tout point.

          Il était aussi performant dans leau que pour traiter les demandes de ses clients mais restait des plus humbles: personne ne lentendait jamais se vanter, il dispensait son savoir à qui voulait, était toujours à lécoute et de bon conseil. sa personne toute entiere inspirait confiance, son visage était paisible et communiquait la sérénité. Il remplissait avec une apparente et déconcertante facilité les objectifs chaque fois plus difficiles à atteindre que ses superieurs distribuaient à tous leurs employés. Il était toujours proprement et sobrement habillé, de cette élégance naturelle et tranquille qui impose le respect lors meme dune simple croisée de couloir ou dautobus.

          Tout le rendait amen, tous lestimaient et vient le jour où on retrouva son corps nu et momifié au milieu de la Seine... lui qui nageait si bien...

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